L’an passé, on a abondamment parlé du magnifique conte de fées d’Andrew Hammond qui a atteint la LNH à 26 ans. Cette année, c’est Mike Condon qui a fait les manchettes en obtenant un poste avec le Canadien à 25 ans. L’histoire que je vais vous raconter est encore plus extraordinaire!
Il y a huit ans, à la même date, un jeune gardien de but de Boisbriand se cherchait désespérément un club de hockey. Retranché tardivement par les Vikings de St-Eustache, les dirigeants de la formation de la Ligue midget AAA l’avaient envoyé rejoindre un club midget B. Oui, vous avez bien lu, midget B. Humilié, Jean-François Bérubé avait alors préféré demeurer à la maison pendant trois longs mois, jusqu’à ce qu’il déniche une équipe où il pourrait continuer de se développer en évoluant dans un calibre de jeu compétitif. Après avoir travaillé fort avec l’entraîneur Jocelyn Deschenes et obtenu une dérogation puisqu’il n’avait que 16 ans, il a été accepté au sein de l’équipe junior AA de Lachute.
Huit ans plus tard, Jean-François Bérubé sera au Centre Bell, jeudi soir, dans l’uniforme des Islanders de New York.
Vous vous rappelez peut-être de la suite de l’histoire. L’automne suivant, Bérubé payait cinquante dollars pour participer au camp ouvert du Junior de Montréal, de la LHJMQ. Impressionné par les prouesses de ce jeune inconnu, l’entraîneur des gardiens Éric Raymond décidait de lui confier le rôle d’adjoint à Jake Allen. Quelques mois plus tard, les Kings de Los Angeles réclamaient Bérubé au début de la quatrième ronde.
À l’issue de son stage junior, fort d’une fiche étincelante de 32-7-8, le gardien québécois se présente au camp des Kings en confiance, mais on lui indique le chemin de la East Coast Hockey League.
« C’est la mentalité à Los Angeles et on m’a expliqué que c’est ce qu’avait aussi fait Jonathan Quick. Ils croient à ce cheminement et je ne me suis jamais senti abandonné pendant mes deux saisons à Ontario, dans la ECHL, raconte Bérubé. On jouait à 50 minutes de L. A. et il y avait toujours un dépisteur ou un entraîneur à nos matchs. On me donnait un rapport après chacune de mes sorties. Je savais qu’on m’avait à l’œil et mon objectif demeurait de m’améliorer pour graduer dans la Ligue américaine », poursuit-il.
En septembre 2013, après deux saisons complètes dans la ECHL, l’espoir des Kings se rapproche de son but suprême et se retrouve avec les Monarchs de Manchester. La première année dans la AHL se déroule relativement bien, puis l’an passé il a compilé des statistiques très impressionnantes avec une fiche de 37-9-4 et une moyenne de buts alloués de 2,18. Après quatre ans dans les mineures, il savait plus que jamais qu’il possédait tout ce qu’il fallait pour atteindre la LNH. Quand les Kings ont conclu une entente avec Jhonas Enroth, le 1er juillet dernier, il s’est douté que ça ne se produirait toutefois pas avec l’organisation qui l’avait repêché six ans plus tôt.
Soumis au ballottage, il a été réclamé par les Islanders avec qui il se retrouve depuis le premier jour du camp d’entraînement, et le 10 octobre dernier, à 24 ans, il a pris part à son premier match dans la LNH en affrontant les Blackhawks, à Chicago.
« J’étais pas mal nerveux, car je savais que c’était un gros défi que d’affronter les champions de la coupe Stanley, se souvient Bérubé. Je me demandais si j’allais être intimidé, mais finalement, j’étais confiant devant le filet, car une fois la partie commencée, la nervosité s’est rapidement dissipée. Les efforts des dernières années ont payé. »
Bérubé n’a pu imiter Andrew Hammond et Mike Condon et il a été contraint de s’avouer vaincu lors de son premier départ en carrière dans le circuit Bettman. Dans la défaite, il s’est quand même bien débrouillé même s’il a cédé sur quatre tirs. Il a effectué trente arrêts, dont un sur une échappée d'Artemi Panarin.
Depuis, Jean-François Bérubé attend sa deuxième chance. À Long Island, on a décidé d’instaurer un ménage à trois cette saison et il partage la besogne avec les vétérans Jaroslav Halak et Thomas Greiss. Jack Capuano ne lui a rien promis pour jeudi soir. Peu importe, ça ne l’empêchera pas de sourire à pleines dents quand il regardera en direction de sa famille dans les gradins.