Bien que le score final prétende le contraire, le Canadien a disputé un meilleur match mardi soir à Vancouver qu’il ne l’avait fait samedi, au Centre Bell, dans sa victoire de 5-3 aux dépens des Maple Leafs de Toronto.
D’accord. On va mettre de côté les 10 dernières minutes qui n’ont été qu’une formalité lorsque les Canucks ont profité d’un repli un brin brouillon d’Alexander Semin pour marquer leur cinquième but. Mais en première période, malgré le score de 3-0 en faveur des Canucks, et surtout en deuxième, même s’il n’a pas marqué, le Tricolore a joué du meilleur hockey que samedi. Pas du grand hockey. Pas du hockey à la hauteur de celui qu’il a offert dans sept de ses neuf premiers gains, mais du hockey meilleur que celui offert samedi contre Toronto. Vous direz qu’il était difficile de faire pire, une remarque avec laquelle je serai d’accord. Mais bon…
L’ennui, et c’est pour cette raison que le Canadien a perdu, c’est que Ryan Miller a été bien meilleur que Jonathan Bernier ne l’a été au Centre Bell. Autre ennui majeur pour le Tricolore, les Canucks ont démontré qu’ils sont en mesure de marquer des buts. Alors que les Leafs…
Ajoutez à cette équation le fait que les Canucks étaient toujours en quête d’un premier gain à la maison à leur sixième match devant leurs partisans, des partisans qui étaient prêts à se ranger derrière l’ennemi venu de Montréal, est on comprendra pourquoi même s’il n’a pas disputé un mauvais match de hockey, le Canadien n’a pas été assez bon pour rivaliser avec Vancouver. Encore moins pour espérer gagner.
À la remorque des Canucks
Les Canucks ont été dans le visage du Canadien du début à la fin du match. Contrairement à ce dont le Canadien avait habitué ses partisans et ses adversaires, ce n’est pas lui qui a dicté l’allure du match. Il a joué au coude à coude dans les premières cinq à 10 minutes de jeu. Les deux équipes ont d’ailleurs échangé des poteaux qu’on entend encore résonner trois heures après la fin du match, mais les Canucks ont pu déjouer Price alors que le Canadien s’est buté trop souvent à Miller.
En plus du flux de motivation relié à cette première victoire à domicile qui commençait un peu trop à leur goût, deux Canucks avaient des raisons supplémentaires de gagner.
Le premier : Ryan Miller. En battant le Canadien, le vétéran gardien gardait sauf son exploit d’avoir été le dernier gardien – le deuxième seulement de l’histoire, à avoir signé un 10e gain consécutif en lever de rideau d’une saison. Je veux bien que tous les records soient faits pour être égalés, voire battus, mais Miller n’allait certainement pas ouvrir la porte trop facilement à Carey Price et au Canadien. Surtout que sa fiche personnelle aux dépens du Tricolore est assez solide merci. À son 45e affrontement contre Montréal, le gardien de 35 ans a signé une 27e victoire. Ce n’est pas rien. C’est même énorme quand on considère que c’est 15 victoires de plus que son nombre de revers (27-12-6) en temps réglementaire.
Les mains de Prust
L’autre joueur ? Non, il ne s’agit pas de Yannick Weber.
Il s’agit bien de Brandon Prust.
Je m’attendais à un très gros match de la part de Prust. Histoire de démontrer au Canadien qu’il a eu tort de le sacrifier pour un plus jeune… et un peu plus fou, en Zack Kassian, je m’attendais à ce que Prust ne trouve une façon d’aller déstabiliser Carey Price au risque de le «picosser» un peu devant son but. Je m’attendais aussi à ce qu’il tente de sortir P.K. Subban, Andrei Markov ou Max Pacioretty de leur zone de confort en les frappant rondement. Ou en les narguant un peu. Pourquoi pas les deux?
C’est plutôt en jouant au hockey avec intensité et en sortant son talent du dimanche que Prust a moussé les chances de victoire des Canucks et miné celle du Canadien.
Prust a été chanceux de voir Carey Price jongler avec la rondelle sur son tir qui a conduit au but de la recrue Jared McCann. Mais personne ne pourra mettre en doute la combativité affichée par Prust pour battre Andrei Markov et décocher le tir qui a mené au but. Et que dire de la passe qu’il a acheminée dans l’enclave vers McCann qui a marqué son deuxième but de la soirée en fin de première, le troisième des Canucks? En revoyant le jeu, on se rend bien compte que Prust orchestre cette passe bien qu’il ne regarde jamais en direction de son coéquipier. Le genre de passe que les frères Sedin complètent à volonté pour mystifier leurs adversaires. Il faut croire que Prust, en plus d’être solide comme le roc, est aussi un bon élève…
C’était plaisant de voir Prust s’imposer comme il l’a fait. Plaisant, car ce joueur au talent limité, a beaucoup donné au Canadien et à ses partisans au cours de son séjour à Montréal. Il a beaucoup donné sur la patinoire et à l’extérieur. Et si on pouvait facilement comprendre le Canadien de décider de miser sur un plus jeune pour le remplacer dans son rôle d’agitateur et joueur de soutien, Prust a démontré mardi, et il tentera de le faire le plus souvent possible, que l’état-major n’a pas eu la main heureuse dans sa sélection du joueur qui devait le remplacer.
Prust a prouvé une chose à ses anciens coéquipiers. Le talent, les systèmes de jeu efficaces, les statistiques et les séquences heureuses ne peuvent venir à bout d’un heureux mélange d’exécution de qualité et d’efforts soutenus.
Je maintiens que le Canadien a joué du meilleur hockey que le score ne le laisse croire. Surtout les trios de soutien, car le trio de Galchenyuk a connu une autre soirée difficile alors que celui de Plekanec n’a pas été en mesure de se distinguer positivement assez souvent. Mais s’il s’est fait poivrer cinq buts et qu’il n’en a marqué qu’un c’est parce que même s’il n’a pas si mal fait, il a joué du hockey aussi soutenu et convaincant que ses adversaires au cours des cinq, six premières minutes du match seulement.
Contre Toronto, ça pouvait passer. Contre un bon club de hockey comme les Canucks, ça ne passerait pas. Et ce n’est pas passé.
Voilà donc la séquence heureuse terminée.
Avec 18 points déjà en banque, le Canadien est en plein contrôle de la situation. Et bien qu’il vienne de perdre un premier match et qu’il était clair que cette première défaite lui tomberait sur le dos un jour ou l’autre, il sera maintenant intéressant de voir si le Canadien se vautrera dans le confort de ses neuf premières victoires ou s’il saura utiliser son premier revers comme source de motivation pour éviter une séquence négative. Mieux encore, pour amorcer une autre séquence gagnante.
On aura la réponse dès jeudi soir. À Edmonton, face aux jeunes Oilers d’Edmonton.