vendredi 17 juin 2016

Julien Gauthier perçoit Pierre-Luc Dubois comme un ami et non un rival

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Julien Gauthier dans l'Antichambre

ÉRIC LEBLANC
JEUDI, 16 JUIN 2016. 09:00

BUFFALO - En raison de la saison de misère du Canadien, le repêchage de la LNH retient encore plus l’attention cette année. Question de mousser l’intérêt davantage, deux espoirs québécois figurent parmi l’élite de la cuvée 2016.
Ces deux joueurs, Pierre-Luc Dubois et Julien Gauthier, ont abondamment fait parler d’eux au cours des derniers mois. Ils possèdent autant de similitudes que de différences. D’abord, ils sont deux attaquants très imposants et talentueux offensivement. Par contre, si Dubois est perçu comme un joueur complet et un meneur émotif, Gauthier semble plus être un marqueur de premier plan et un complément de luxe.
Inévitablement, cette situation a fini par se dessiner en une compétition pour déterminer le candidat au potentiel le plus élevé. Au milieu de la saison, Gauthier s’était emparé de l’avance en tant que quatrième espoir nord-américain. Établi septième à ce classement, Dubois a drastiquement renversé la vapeur pour devenir le meilleur espoir sur la liste finale de la Centrale de recrutement de la LNH.

Gauthier a plutôt fait le chemin inverse en reculant au 12e échelon et il vit donc le côté un peu moins rose des comparaisons avec Dubois dans les prévisions qui se multiplient depuis quelques années.
« Ça ne me dérange pas du tout, je ne peux rien y faire. J’essaie seulement de faire ce que je peux pour que je sois bien préparé », a répondu Gauthier à propos de ce contexte.
Par contre, Gauthier a avoué qu’il ne raffolait pas de la rivalité que les amateurs semblent vouloir implanter entre eux.
« On dirait que le monde voudrait qu’on se haïsse. De la manière qu’ils nous parlent, on dirait qu’ils souhaiteraient qu’on se déteste pour que la compétition soit plus forte, mais ce n’est pas toujours comme ça dans la vie », a exposé le patineur des Foreurs de Val-d’Or.
« En plus d’être un ami, c’est un super bon gars et tout un joueur de hockey. Je ne lui enlève rien, il mérite tout ce qu’il a. Il faut laisser l’autre gagner sa médaille et gagner la sienne », a enchaîné Gauthier qui est un peu agacé de cette mise en scène.
Les nombreuses sources consultées admettent que Gauthier a manqué de constance, mais ils témoignent tous de son énorme potentiel et de ses qualités peu fréquentes.
« Les gens sont durs avec lui. S’il n’avait pas joué une année de plus dans la LHJMQ avant d’être repêché, il aurait pu sortir autour du top-10 l’an passé. Tu finis par le voir et le voir encore si bien que tu remarques un peu plus ses défauts. Je veux être prudent parce qu’ils sont rares les gars comme lui. Il est probablement parmi les trois plus excitants espoirs par rapport à ce qu’il peut devenir », a raconté un premier dépisteur d’une équipe de l’Ouest en parlant de son incroyable potentiel.
« Il a manqué de constance, mais ce n’est pas si surprenant, c’est un gars de séquences. Il peut autant être le meilleur joueur sur la glace un soir et être un fantôme à la prochaine partie. Il n’exploite pas encore assez bien son coffre à outils, mais ça pourra venir », a poursuivi cet intervenant.Julien Gauthier
Julien Gauthier (Source: Vincent Ethier)

« Oui, on aurait aimé qu’il finisse la saison en force après le Championnat mondial junior, mais son potentiel est indéniable. Il n’est pas un feu de paille. Ce ne sont pas deux ou trois mois qui vont venir scrapper tout ce qu’il a accompli, il faut faire attention avec ça », a ajouté un recruteur d’un club de l’Est.
Quant à Dan Marr, le directeur de la Centrale de recrutement de la LNH, il préfère se dire que ce sont d’autres joueurs qui ont fini par le devancer.
« Son sens offensif du hockey est un atout de taille. Quand tu combines ça avec son gabarit et sa force, il est difficile à couvrir et à contrer si bien que ça provoque des punitions. C’est le gars qui parvient toujours à se placer pour marquer, c’est tellement utile dans la LNH où les buts sont si recherchés », a rapporté Marr qui le classe 12e espoir nord-américain.
Du côté de la firme ISS Hockey, Dennis MacInnis a remarqué la même tendance tout en déplorant son implication pendant les séries.
« Il a connu des séries décevantes après une saison très réussie de son équipe. On s’attendait un peu à ce qu’il assume le rôle de leader », a jugé MacInnis.
Une baisse de régime après ÉCJ
En tant qu’entraîneur de Gauthier avec les Foreurs, Mario Durocher n’a pas besoin de réfléchir longtemps pour expliquer le rendement moins étincelant de son protégé en deuxième partie de saison.
Selon lui, Gauthier a atteint son apogée de 2015-16 quand il s’est taillé une place avec Équipe Canada Junior en tant que plus jeune représentant du groupe.
« Pour un athlète, c’est très difficile de grimper à son sommet (peaker) deux fois dans une saison. Il a travaillé très fort pour être choisi et il est parti pendant un mois. C’était le seul joueur qui n’était pas repêché et ça vient avec une pression quand tu joues pour ÉCJ », a souligné Durocher.
« Quand il est revenu, il fallait faire attention et le protéger un peu. Il y avait aussi une pression médiatique à son retour par rapport à la compétition entre lui et Pierre-Luc. Notre équipe allait bien alors on a pu le ménager et je pense que c’est plus une fatigue mentale qui s’est installée dans son cas », a enchaîné l’entraîneur d’expérience.
« C’est compréhensible, c’est un kid de 18 ans. C’est fréquent, j’ai dirigé des joueurs qui sont allés avec ÉCJ et qui ont cassé à un certain moment par la suite. »
Julien Gauthier
Julien Gauthier (Source: Getty)
Quant à la baisse de confiance, Durocher n’adhère pas à cette théorie.

« Non, Julien a confiance en ses moyens. Il pouvait penser trop et serrer un peu plus le bâton, mais il a quand même marqué 41 buts en 54 parties, c’est plutôt bien », a répondu le pilote des Foreurs.
En étant si talentueux et costaud, Gauthier ne peut passer pas inaperçu sur la patinoire.
« Avec son physique, ça paraît toujours un peu plus quand ça ne roule pas pour lui. Inévitablement, tu le regardes quand il saute sur la glace, il ne peut pas se cacher. Quand Dubois jouait des parties plus ordinaires, il parvenait à être efficace quand même contrairement à Gauthier », a mentionné un deuxième recruteur d’une organisation de l’Ouest.
À un certain point, de petites divergences d’opinion entre Gauthier et Durocher ont été soulevées comme autre hypothèse.
« Je ne sais pas d’où ça sort, mais ce n’est absolument pas le cas. Je n’ai pas eu de problèmes avec lui et j’ai essayé de le protéger un peu à son retour d’ÉCJ. C’est un jeune que j’aime beaucoup, ça fait trois ans que je travaille avec lui et il est en lice pour être un choix de première ronde », a rétorqué Durocher.
Un as buteur en devenir ?
Véritable « machine » d’entraînement comme son père, son oncle (Denis) et son grand-père, Gauthier pourrait être prêt à s’illustrer dans la LNH plus rapidement que certains de ses compagnons de classe. Les nombreux sacrifices effectués lui semblent encore plus judicieux.
« Certains parents laissent leurs enfants manger du McDo, mais ils ne leur permettent pas d’aller au gymnase », a relevé Gauthier avec une belle répartie.
Ses atouts physiques favoriseront son éclosion, mais son arme principale demeure sa touche de marqueur. D’ailleurs, il n’est pas impossible que Gauthier devienne un as buteur s’il est bien entouré.
« Oui, je crois que c’est possible. Je suis confiant en mes moyens pour la suite de ma carrière », a humblement jugé Gauthier l’auteur de 38 et 41 buts à ses deux dernières saisons.
Les recruteurs partagent son avis et la comparaison la plus fréquente l’associe à nul autre que Rick Nash.
« Avec son physique, son lancer et son désir de marqueur, c’est un atout majeur pour une équipe. Je ne pense pas qu’il sera le meneur sur un trio, mais c’est un très bon joueur complémentaire. C’est un morceau du casse-tête dont les équipes ont besoin », a indiqué le deuxième dépisteur de l’Ouest consulté.
Afin de traduire cet immense potentiel dans la LNH, Gauthier peut notamment se tourner vers son oncle qui a joué plus de 500 matchs dans le circuit Bettman.
« C’est un jeune qui accepte bien les conseils. J’ai essayé de l’aider quelques fois, mais il a aussi fait son chemin par lui-même et en écoutant ses parents. Je vais partager tous les conseils que je peux, je me considère privilégié d’avoir vécu ça et je lui souhaite la même chose », a conclu celui qui agit comme analyste à RDS.