Mark Barberio a joué dans l’ombre des Brendan Gallagher, Max Pacioretty et Mike Condon lors de la grande Classique hivernale, vendredi, à Foxboro.
Contrairement au fougueux ailier droit qui a survolté l’attaque du Canadien et au gardien qui a su protéger la cage du Tricolore contre les rares assauts des Bruins, le défenseur montréalais ne s’est pas hissé parmi les étoiles de la rencontre. De nature effacée, Barberio se tenait fin seul dans un coin du vestiaire alors qu’à quelques pas de lui, P.K. Subban était entouré d’une bonne trentaine de journalistes et de cameramans. Subban venait de disputer un match solide. Un match au cours duquel il avait passé plus de 27 minutes sur la patinoire, dont six en avantage numérique et quatre à court d’un homme.
Plus discret que son flamboyant coéquipier sur la patinoire comme dans le vestiaire, Barberio venait toutefois de disputer un grand match de hockey. Son capitaine Max Pacioretty a même surpris les journalistes lorsqu’il a offert aux joueurs de soutien du Tricolore un grand pan de la responsabilité de la victoire de 5-1 aux dépens des Bruins. « Vous ne l’avez peut-être pas remarqué, mais à mes yeux Mark Barberio était notre meilleur joueur sur la patinoire aujourd’hui », a tranché le capitaine.
Pacioretty avait raison. Au cours de ses 20 présences totalisant 15 :14 de temps d’utilisation –toujours à cinq contre cinq – Barberio a récolté une passe en plus de compléter son après-midi de travail avec un différentiel de plus-3, le meilleur du Canadien sur un pied d’égalité avec celui de son partenaire Alexei Emelin.
Visiblement heureux de son après-midi de travail, Barberio l’était plus encore d’avoir pris part à la Classique hivernale. « Je pourrais être à Utica aujourd’hui. Le simple fait d’avoir eu la chance de participer à un match comme celui d’aujourd’hui est une très belle récompense. C’était vraiment sensationnel. Une expérience que je n’oublierai jamais. Mon premier match dans la Ligue nationale – avec le Lightning de Tampa Bay dont il a été un choix de 6e ronde en 2008 – et mon premier match en séries éliminatoires l’an dernier contre le Canadien au Centre Bell étaient les deux plus beaux moments de ma carrière. Le match d’aujourd’hui les rejoint tout en haut de la liste», racontait l’arrière âgé de 25 ans.
À Montréal pour combien de temps?
Solide dans toutes les facettes du jeu, le duo Barberio-Emelin s’est imposé avec un total de cinq tirs cadrés (trois pour Emelin) et par la qualité du travail défensif abattu autour de Mike Condon.
Après avoir passé les deux derniers matchs sur la galerie de presse en raison de sa séquence misérable de 12 matchs consécutifs au cours desquels il a non seulement récolté aucun point, mais accumulé un terrible différentiel de moins-11, Emelin avait besoin d’une sortie de cette qualité pour reprendre sa place au sein de la brigade défensive du Tricolore.
Dans le cas de Barberio, une telle performance devrait simplement l’aider à prolonger son séjour à Montréal.
Rappelé du club-école en raison de la blessure subie par Tom Gilbert, Barberio a disputé les trois derniers matchs du Canadien. Il a connu un solide match à Tampa Bay le 28 décembre en compagnie de Greg Pateryn. Il a connu une soirée beaucoup plus difficile le lendemain contre les Panthers de la Floride. Vendredi, lors de la Classique hivernale, il a prouvé à ceux qui en doutent peut-être encore qu’il est en mesure d’assumer une place de défenseur régulier au sein de la brigade du Canadien.
Combien de temps Barberio passera à Montréal? Combien de matchs disputera-t-il? Difficile de répondre à cette question.
Ce qui est clair toutefois, c’est que s’il joue régulièrement comme il l’a fait à Tampa Bay et Foxboro vendredi, le Canadien sera nerveux s’il doit soumettre Barberio au ballottage avant de le retourner à Terre-Neuve.
Pour le moment, le ballottage n’est pas nécessaire. Cette procédure deviendra obligatoire si Barberio dispute 10 matchs au cours de son séjour avec le grand club ou qu’il passe 30 jours dans l’entourage du Tricolore.
Pourquoi se méfier d’une éventuelle présence au ballottage alors que Barberio a été boudé par les 29 autres équipes de la LNH lorsque le Canadien l’a retourné aux mineures en début de saison?
Parce que les besoins des équipes ont changé en cours de saison. Et que plus on s’approchera de la date limite des transactions, plus les équipes tenteront de renforcer leur alignement. De donner plus de profondeur à leur formation. Surtout en défensive.
Devant Tinordi et Gilbert?
Embauché à titre de joueur autonome l’été dernier, Mark Barberio a été victime du trop-plein de défenseurs à la ligne bleue en début de saison.
Je n’ai jamais caché que le Canadien aurait été mieux servi à mes yeux avec Barberio (salaire annuel de 600 000 $) et Greg Pateryn (salaire de 575 000 $ ponction sous le plafond de 562 500 $) qu’avec Tom Gilbert qui commande un salaire de 2,8 millions $.
L’état-major du Tricolore a jugé le contraire en cédant les deux jeunes arrières pour garder Gilbert à Montréal. Et comme le Tricolore n’a jamais voulu courir le risque de perdre Tinordi au ballottage, Barberio et Pateryn ont dû prolonger leur séjour dans les mineures malgré le fait que Tinordi était boudé par le grand club.
Barberio, qui comptait 103 matchs d’expérience dans la LNH à l’époque, convient que son renvoi a été difficile à accepter. « Parce que le Canadien m’avait offert un contrat, je croyais vraiment avoir une chance de rester à Montréal. J’ai été déçu sur le coup, mais une fois à Terre-Neuve je me suis dit que je devais jouer le meilleur hockey possible et assumer du leadership devant les jeunes défenseurs de l’organisation. »
Barberio a respecté son plan. Et lorsqu’il commençait à broyer du noir alors que le Canadien rappelait plusieurs attaquants sans toutefois lui faire signe, le défenseur a reçu l’appui de son entraîneur-chef Sylvain Lefebvre, un ancien défenseur dans la LNH.
« Il m’a remonté le moral. Il m’a encouragé à ne pas lâcher. À continuer à travailler fort parce que le Canadien pourrait me rappeler n’importe quand. Deux ou trois jours plus tard, je recevais l’appel », racontait le défenseur originaire du West Island.
La patience de Mark Barberio a donc été récompensée. Elle le sera davantage si le Canadien décide de lui offrir une vraie chance de prouver qu’il a plus à offrir que Tom Gilbert et que cette offre viendra à bien meilleur prix. Ou si le Canadien conclut que le temps est venu de miser sur Barberio et de couper les ponts avec Jarred Tinordi en échangeant le défenseur malgré son statut de premier choix et la crainte qu’il puisse se développer ailleurs, mieux qu’il ne l’a fait jusqu’ici avec le Tricolore.