En Amérique du Nord, son style bouillonnant et ses colères magistrales lui ont valu le surnom d'Iron Mike, Mike d'Acier. C'est donc sans surprise que l'entraîneur canadien de hockey sur glace Mike Keenan a réussi son intégration dans la capitale russe de la sidérurgie, Magnitogorsk.
Cette ville de 400 000 habitants, au pied des montagnes de l'Oural, était plus connue en Russie pour ses usines métallurgiques, les plus grandes du pays, que pour son club de hockey, le Metallurg.
Sous les ordres de Mike Keenan, dont c'était la première saison au club, le Metallurg a pourtant remporté en 2014 la première Coupe Gagarine de son histoire, le titre suprême en Ligue continentale de hockey (KHL).
L'entraîneur canadien, vainqueur de la coupe Stanley de la Ligue nationale de hockey avec les Rangers de New York en 1994, devint à cette occasion le premier entraîneur à remporter les deux plus prestigieuses ligues de hockey sur glace.
Mais si certains en Russie le comparent à Staline en raison de son caractère ombrageux et de son despotisme à l'entraînement, c'est en Lénine qu'il s'est déguisé il y a quelques semaines pour les besoins d'une vidéo promotionnelle de son club.
« Je ne sais pas si je suis un révolutionnaire », assure à l'AFP Mike Keenan, 65 ans, dont les cheveux fins et les gestes amples peuvent faire penser au père de la révolution russe. « Mais peut-être que dans le monde du hockey, je le suis un peu. »
La nationalité russe?
Tout n'est pourtant pas si rose en KHL. La ligue russe, qui accueille aussi des clubs d'Europe de l'Est ou du Kazakhstan, a adopté une règle limitant à cinq le nombre de joueurs étrangers dans chaque club et les entraîneurs étrangers sont de moins en moins recherchés.
Mais posséder un passeport étranger n'a jamais été un problème pour Mike Keenan, adopté par le public russe et qui a su s'immerger dans son nouvel environnement.
Cet été, il a toutefois fait les gros titres en évoquant la possibilité de prendre la citoyenneté russe. S'il parle peu le russe, l'entraîneur canadien, qui a marqué l'histoire de la NHL en devenant le septième entraîneur comptabilisant le plus de victoires (672), assure que « c'est mieux de comprendre que d'être compris ». « C'est ma responsabilité. C'est moi le produit importé maintenant, je suis l'étranger », ajoute-t-il.
Et si ses joueurs lui reprochent parfois d'être trop dur à l'entraînement, il est « le plus russe des entraîneurs que nous n'ayons jamais eu », sourient les dirigeants du Metallurg Magnitogorsk.
Vainqueur de neuf de ses onze premiers matchs cette saison, le Metallurg Magnitogorsk est actuellement deuxième de l'Association Est de KHL.
« Gagner... ou gagner »
« Les attentes ici sont les mêmes qu'en NHL. Tu as le choix entre gagner... et gagner », assure Mike Keenan dont l'équipe, handicapée par les blessures, avait échoué en demi-finales des séries l'an passé.
Et la très étendue KHL, où jusqu'à 8000 kilomètres séparent les clubs de Vladivostok et Zagreb, lui offre d'autres défis. Le calendrier de 60 matchs, à comparer aux 82 matchs de la saison régulière de LNH, offre ainsi moins de marge d'erreur aux favoris.
Si le Canadien se dit heureux au Metallurg, il n'a pas abandonné le désir de revenir dans la LNH, d'où il était parti en 2009 après un dernier passage aux Flames de Calgary. Il n'a rien perdu de son talent de gagneur, et de grogneur, bien qu'il concède ne plus entraîner avec la même fougue qu'à ses débuts en 1984, à 34 ans. "Mon style a toujours été mon fil conducteur, mais je pense que ma méthode a changé », explique-t-il.
Les joueurs du Metallurg, eux, affirment toutefois avoir profité de l'approche nord-américaine de Mike Keenan, dans laquelle le physique est prédominant.
« Il attend énormément de ses joueurs. Mais il est juste, ce qui est très important », explique à l'AFP l'ailier canado-polonais Wojtek Wolski, 451 matches de NHL au compteur.
Comme mentor, Mike Keenan évoque Scotty Bowman, vainqueurs neuf Coupes Stanley et 1.244 victoires en NHL dans sa carrière, le record absolu.
Scotty Bowman avait entraîné jusqu'à 68 ans, laissant à Mike Keenan l'espoir d'un retour dans la LNH. Mais quand on lui demande s'il pense que ses succès russes ont des résonances dans son pays, il préfère hausser des épaules : « Mon parcours parle de lui-même ».